
Le 1er janvier 2026, plusieurs modifications fondamentales du droit des obligations (CO) et du code civil (CC) entreront en vigueur. Cette révision renforce la protection légale des maîtres de l’ouvrage ainsi que des acheteurs et apporte différentes clarifications bienvenues.
Code des obligations et normes SIA-118 au prisme des expériences de terrain
Aujourd’hui, le droit des obligations stipule qu’un défaut découvert après la réception de l’ouvrage doit faire l’objet d’un avis immédiat, faute de quoi l’ouvrage est tenu pour accepté en l’état au sens de l’art. 370 al. 3 CO. Or, il est rapidement apparu que cette disposition est difficilement applicable dans le domaine de la construction.
C’est en ce sens que la norme SIA 118 « Conditions générales pour l’exécution de travaux de construction » a par exemple introduit des dispositions proposant un équilibre différent des forces en présence, notamment un délai d’avis des défauts de deux ans en lieu et place de l’avis immédiat prévu par le Code des obligations. Pour qu’elle puisse trouver application, il faut naturellement que les parties aient convenu d’intégrer la norme SIA 118 au contrat d’entreprise.
La révision du droit des obligations, qui entrera en vigueur en 2026, prévoit différents aménagements qui viennent renforcer dans la loi certains mécanismes de protection des parties au contrat d’entreprise.
Le principe du droit à la réfection (art. 368 al. 2bis CO) et responsabilité du maître d’ouvrage
Un droit irrévocable de réfection sans frais en cas de défauts sera inscrit dans tous les contrats d’entreprise dans le domaine de la construction. Une exclusion contractuelle de ce droit ne sera plus admise pour les constructions neuves et de moins de deux ans.
Cette disposition rejoint l’esprit du droit de réfection défini à l’article 169 de la norme SIA 118, en vertu duquel le maître de l’ouvrage ne peut dans un premier temps exiger – mis à part les dommages-intérêts selon l’art. 171 SIA 118 – que l’élimination des défauts dans un délai raisonnable.
Avis des défauts dans les 60 jours (art. 367 al. 1bis CO)
Les défauts devront être signalés par écrit dans les 60 jours suivant leur découverte – un délai fixé par la loi qui ne peut être réduit contractuellement. L’avis des défauts reste sujet à réception par son destinataire et il doit être justifié par une présentation suffisamment étayée et concrète des défauts annoncés.
Pendant les deux années qui suivent la réception de l’ouvrage, la norme SIA 118 prévoit, à l’art. 172 al. 2, un délai de dénonciation d’une durée de deux ans valable en tout temps en cas de défauts survenant après la réception. Passés ces deux ans toutefois, d’éventuels défauts doivent à nouveau faire l’objet d’un avis immédiat afin qu’il soit possible de faire valoir son droit de réfection.
S’agissant des défauts cachés, l’art. 179 al. 2 de la norme SIA 118 prévoit que l’entrepreneur ne doit en répondre que si le maître de l’ouvrage les signale immédiatement après les avoir découverts. Du fait de la nouvelle disposition impérative à l’art 219a ainsi qu’à l’art. 367 al. 1bis CO l’art. 179 al. 2 de la norme SIA 118 devra être considérée caduque pour tous les contrats conclus à partir du 1er janvier 2026. Le délai légal de 60 jours après découverte du défaut prévu dans le code ces obligations dès 2026 primeront sur les clauses contractuelles fondées sur la norme SIA 118.
La révision de la loi n’aura en revanche aucun effet en ce qui concerne la responsabilité du maître de l’ouvrage en cas de dommages consécutifs à des défauts qu’il a omis de signaler à temps : il doit supporter les dommages qui auraient pu être évités si le défaut qui en est à l’origine avait été traité immédiatement comme le prévoit l’art. 173 al. 2 de la norme SIA 118.
Prescription des droits de garantie (art. 371 al. 3 CO)
Le délai de prescription légal pour les droits de garantie reste fixé à cinq ans, comme le prévoit également la norme SIA 118, mais il sera désormais de nature partiellement impérative. Ainsi, toute clause contractuelle désavantageant le maître de l’ouvrage ou le mandant ne sera plus admissible selon l’art. 371 al. 3 CO.
Contrats de vente avec obligation de construire (art. 219a CO)
Les contrats de vente immobilière avec obligation de construire seront dorénavant en partie soumis aux mêmes règles que celles du droit des contrats d’entreprise, ce qui, dans la pratique, concerne particulièrement les modèles d’entreprise générale et totale.
Désormais, les acheteurs ayant fait l’acquisition d’un terrain sur lequel est érigé un ouvrage neuf ou construit au plus tard dans les deux ans précédant la vente jouissent de droits similaires à ceux d’un maître de l’ouvrage en vertu de l’art 219a al. 2 CO. Ils se voient ainsi accorder un droit inaliénable de réfection pour d’éventuels défauts.
Inscription d’une hypothèque légale des artisans et des entrepreneurs (art. 839 al. 2 CC) : sûretés à fournir
Dans le cas où une hypothèque légale est remplacée par des sûretés, celles-ci doivent couvrir les intérêts moratoires pour une durée de dix ans.
Recommandations pour les projets en cours
Les projets de construction en cours liés à des contrats conclus avant le 1er janvier 2026 sont en principe soumis à l’ancien droit, sauf s’ils renvoient explicitement au nouveau droit ou sont modifiés ultérieurement. Il est toutefois recommandé de tenir compte de l’évolution du cadre légal lors de l’établissement du contrat, soit en particulier:
- de ne pas prévoir de raccourcissement du délai d’avis des défauts ou de prescription ;
- de formuler clairement les clauses relatives au droit de réfection ;
- de tenir compte des intérêts moratoires sur 10 ans lors du calcul des sûretés dans un contexte d’hypothèque légale;
- de vérifier que les renvois à la norme SIA 118 sont compatibles avec les nouvelles dispositions légales.
Pour les nouveaux appels d’offres et mandats de planification établis en 2025, il est recommandé de s’adapter aux changements légaux à venir pour prévenir d’éventuels conflits.
Dans le cas d’un projet de construction achevé et livré en 2026 mais entamé en 2024 sur la base de contrats d’entreprise fondés sur l’ancien droit, celui-ci s’appliquerait conformément aux clauses du contrat, même pour des défauts identifiés et signalés en 2026. En revanche, si dans le cadre de ce même projet, des contrats de vente pour une propriété par étage sont conclus en 2027, les acheteurs peuvent prétendre à la réfection de défauts à condition de les notifier en bonne et due forme par un avis dans un délai de 60 jours suivant leur découverte – ce même si les contrats d’entreprise d’origine ne le prévoyaient pas.