La société à responsabilité limitée (Sàrl) est une société de capitaux à caractère personnel que forment une ou plusieurs personnes ou sociétés commerciales. C’est une personne morale distincte de ses associés qui possède ses propres droits et obligations. Après la société anonyme (SA), la Sàrl est une des formes juridiques les plus utilisées en Suisse.

Constitution d’une société à responsabilité limitée

Le capital-social minimum est de CHF 20’000.- et doit être intégralement libéré au moment de la constitution sous forme d’apport en espèce, en nature (aux mêmes conditions que pour la SA soit celles de l’art. 634 CO) ou en compensation d’une créance.

Les parts sociales doivent avoir une valeur nominale supérieure à zéro. Pour être valable, leur souscription requiert l’indication du nombre, de la valeur nominale et du prix d’émission des parts sociales, ainsi que l’indication de leur catégorie (art. 777a CO).

La Sàrl est constituée par un acte authentique (notarié) dans lequel le ou les fondateurs déclarent fonder une société à responsabilité limitée, arrêtent le texte des statuts et désignent les organes. Elle acquiert la personnalité par son inscription au registre du commerce (RC). Les personnes qui agissent au nom de la société avant son inscription au RC en sont personnellement et solidairement responsables. Elles ne sont libérées des obligations contractées expressément au nom de la Sàrl, que si cette dernière reprend les obligations dans les trois mois à compter de son inscription au RC.

La Sàrl doit pouvoir être représentée par une personne domiciliée en Suisse. Il peut s’agir d’un gérant ou d’un directeur (art. 814 al. 3 CO).

Organes de la société à responsabilité limitée

L’assemblée des associés

L’assemblée des associés est l’organe principal de la Sàrl. Elle a des compétences exclusives, comme la modification des statuts, la nomination et la révocation des gérants et de l’organe de révision, l’approbation des comptes annuels ou encore l’utilisation des bénéfices. Certaines dispositions du droit de la SA relatives à l’assemblée générale s’appliquent par analogie de sorte que l’assemblée peut se tenir sous forme électronique et sans lieu de réunion physique pour autant que les conditions soient remplies (art. 805 CO).

Contrairement à la SA, l’assemblée des associés de la Sàrl a un poids plus important et peut, dans certaines circonstances, exercer une influence directe sur les affaires de la société.

Les gérants

Dans une Sàrl, les associés exercent collectivement la gestion de la société (art. 809 CO). Ils peuvent également (et c’est souvent le cas en pratique) élire comme gérant un ou plusieurs membres, qui ne doivent pas nécessairement avoir la qualité d’associés, et qui seront chargés de la gestion et de la représentation de la société.

A noter que seules des personnes physiques peuvent être désignées comme gérants. Lorsqu’une personne morale ou une société commerciale a la qualité d’associé, elle doit désigner une personne physique qui exerce cette fonction à sa place.

Les gérants exercent la haute direction de la société, décident de l’organisation, fixe les principes de comptabilité, établissent le rapport de gestion, préparent l’assemblée des associés et exécutent ses décisions, etc. Tout comme dans la SA, ils ont la faculté de nommer et révoquer d’autres personnes qui gère la société (ex. directeurs, fondés de pouvoir), sans pour autant avoir l’entière responsabilité de la gestion.

L’organe de révision

Les Sàrl sont soumises aux dispositions relatives à la comptabilité valables pour les SA (art. 818 CO). Partant, il est possible de renoncer à avoir un organe de révision (auditeur) qui vérifie les comptes annuels, pour autant que toutes les conditions pour une révision restreinte soient remplies (par opposition au contrôle ordinaire obligatoire dans les grandes sociétés). Conformément à l’art. 727a al. 2 CO, moyennant le consentement de l’ensemble des associés, la société peut ainsi renoncer au contrôle restreint lorsque son effectif ne dépasse pas dix emplois à plein temps en moyenne annuelle. Lorsque les associés ont valablement renoncé au contrôle restreint, cette renonciation est également valable les années qui suivent. Chaque associé a toutefois le droit d’exiger un contrôle restreint au plus tard dix jours avant l’assemblée des associés. Celle-ci doit alors élire l’organe de révision. Au besoin, le conseil des gérants procède à l’adaptation des statuts et requiert que l’organe de révision soit radié du registre du commerce.

Fiscalité

La Sàrl est une personne juridique distincte et partant imposée séparément des associés. Si elle réalise des profits, elle devra payer des impôts sur les bénéfices. Si, de ces bénéfices, elle verse un dividende aux associés, ceux-ci devront également déclarer ce dividende comme revenu. Ce mécanisme constitue une double imposition. Il en va de même du capital-social puisque la Sàrl doit payer l’impôt sur le capital et l’associé doit s’acquitter d’un impôt sur la fortune, en fonction de la valeur des parts sociales.

L’impôt sur le bénéfice est perçu par la Confédération, le canton et la commune où la Sàrl a son siège et constitue le poste le plus important, l’impôt sur le capital étant perçu uniquement par le canton et la commune, habituellement à des taux plus faibles. A titre indicatif, le taux d’impôt fédéral direct sur le bénéfice net se monte à 8.5% pour les Sàrl (art. 68 LIFD) auxquels s’ajoute les impôts cantonaux et communaux.

Responsabilité

Responsabilité des gérants

Les gérants peuvent être tenus personnellement responsables des dommages qu’ils provoqueraient par manquement à leurs devoirs (art. 812 CO), que ce soit intentionnellement ou par négligence. Les principales situations de responsabilité incluent:

  1. Faute dans la gestion: si les gérants prennent des décisions manifestement contraires à l’intérêt de la société ou omettent de prendre les mesures nécessaires pour prévenir un préjudice ;
  2. Infractions aux prescriptions légales: en cas de violation à des lois (droit des sociétés, droit fiscal, droit sur les assurances, etc.). En matière de cotisations sociales impayées notamment, les gérants et toutes les personnes qui s’occupent de la gestion ou de la liquidation de la société répondent à titre subsidiaire du dommage qui peut être causé à la caisse de compensation (art. 52 LAVS) ;
  3. Faillite: les gérants peuvent être tenus responsables si la société tombe en faillite en raison d’une gestion inappropriée ou frauduleuse. Ils peuvent aussi être tenus responsables en cas de retard dans le dépôt d’une une demande de sursis concordataire et de retard dans l’avis au juge en cas de surendettement (art. 820 CO et renvoi aux art. 725 ss CO), étant précisé que les dispositions du droit de la SA régissant la menace d’insolvabilité, la perte de capital et le surendettement sont applicables par analogie.

Responsabilité des associés

De manière générale, les associés sont tenus à la sauvegarde du secret des affaires de la société (art. 803 CO). Ils doivent ainsi s’abstenir de tout ce qui peut porter préjudice aux intérêts de la société et partant ne pas gérer des affaires qui leur procureraient un avantage particulier mais qui seraient préjudiciables au but de la société. Les statuts peuvent également prévoir une interdiction de concurrence pour les associés.

Sur le plan économique, les associés peuvent être tenus de procéder à des « versements supplémentaires » (art. 795 ss CO), soit en plus de leur apport initial au capital social. Ces versements doivent être expressément prévus par les statuts et sont généralement utilisés pour répondre à des besoins de financement ponctuels ou pour faire face à des difficultés financières. De manière pratique, cela signifie que lorsque les statuts prévoient une telle obligation (circonscrite de manière claire dans les statuts quant à son but et au montant du versement), la société aura une créance contre l’associé qu’elle pourra faire valoir par voie de poursuite au besoin.

En outre, les associés peuvent être encore être tenus de fournir des « prestations accessoires » (art. 796 CO). Ces prestations se rapportent à des comportements, des activités ou des échanges de prestations (ex. obligation découlant d’un droit d’emption statutaire, etc.). Ces prestations accessoires qui doivent être prévues dans les statuts doivent servir le but de la société ou viser à assurer le maintien de son indépendance ou encore le maintien de la composition du cercle des associés.

Toutefois, en dehors des mécanismes spécifiques précités (versements supplémentaires et prestations accessoires), le patrimoine personnel des associés reste distinct de celui de la société de sorte que les créanciers de la Sàrl ne peuvent pas venir les rechercher sur leur patrimoine privé pour couvrir les dettes de la société.

Conclusion

La Sàrl est une structure juridique bien adaptée aux PME et aux entreprises familiales en Suisse. Tout comme la SA, elle protège contre la responsabilité personnelle illimitée de ses propriétaires, tout en comportant un capital de départ plus bas. Elle comporte un caractère personnel plus marqué que la SA qui se traduit notamment par un devoir de fidélité des associés. De plus, elle peut être transformée en SA ultérieurement, sans aucune liquidation, ce qui offre une plus grande flexibilité de développement en cas d’expansion de la société.

En contrepartie, elle comporte des coûts élevés de constitution et de gestion, des formalités administratives plus lourdes que celles de l’entreprise individuelle (tenue et convocation des assemblées des associés, tenue des procès-verbaux, etc.) et peut comporter des inconvénients en matière fiscale (double imposition). Contrairement à la SA où l’anonymat des actionnaires prévaut (seuls les noms des membres du conseil d’administration apparaissent), le nom des associés est accessible au RC. Enfin, il convient de noter que les gérants ne peuvent pas bénéficier d’indemnités de chômage, sauf s’ils quittent définitivement l’entreprise.